J’ai d’abord été attirée par
l’affiche qui a rappelé à mon bon souvenir un reportage vu à la télé sur l’incroyable
système des Dabbawallahs, ces
porteurs de repas de la ville de Mumbai. Des porteurs quasi infaillibles qui
arpentent vaillamment et surtout rapidement les rues bondées de cette mégapole
indienne pour livrer les repas préparés majoritairement par les femmes depuis
le domicile familial à destination des maris exerçant leur fonction à plusieurs
kilomètres de leur foyer ou à destination de leurs enfants scolarisés.
Le film The Lunchbox, aux allures de
documentaire, offre une romance "culino-épistolaire" entre une jeune femme
délaissée par son mari et un homme à quelques jours de la retraite qui reçoit
un jour, par exceptionnelle erreur, le repas préparé par l’héroïne pour son
mari. Débute alors entre les deux protagonistes, une idylle naviguant entre frustrations
et désillusions.
The Lunchbox, c’est tout d’abord un voyage
en Inde à moindres frais. Le réalisateur nous enveloppe de toutes les senteurs,
les bruissements, l’étouffement de la vie citadine indienne. Pendant près de deux
heures, il parvient à nous faire oublier le pavé parisien mieux que la 3D en
faisant appel à nos sens. Sens qui demeureront en éveil tout au long du film,
en émoi à chaque ouverture de la Dabba (fameuse « lunchbox »
contenant dans différentes boites métalliques empilées, le repas préparé le
matin même), à chaque tentative désespérée de l’héroïne pour séduire de nouveau
un mari qui reste sourd à une sensualité exacerbée par tant de retenue.
Mais The Lunchbox, c’est aussi nombre
de questionnements, d’appels à la réflexion sur :
Ce formidable pied de nez à la mondialisation, à la toute-puissance
du numérique, au règne de la docile machine sur l’homme défaillant. J’ai été
subjuguée par l’organisation des Dabbawallahs, corporation composée de milliers
d’hommes, le plus souvent illettrés, qui livrent avec la plus haute précision
chaque jour de nombreux repas aux bons destinataires. Je retiens avec amusement
la scène du livreur excédé à l’annonce de l’erreur présumée et qui rappelle à l’héroïne
accusatrice que le système auquel il appartient a été marqué du sceau de
l’admiration et de toute la reconnaissance des chercheurs de Harvard. L’engagement
humain, le sentiment d’appartenance, semblent regarder de haut la puissance pécuniaire.
Une condition féminine en pleine mutation. Dans une société où le
statut de la femme oscille entre accès aux hautes fonctions et brimades
traditionnelles, les préoccupations de l’héroïne apparaissent encore comme novatrices
puisque celle-ci aspire non pas à la sérénité du foyer mais à l’épanouissement
personnel.
Une société encore rongée par les inégalités fondées sur l’appartenance
aux castes ou les préjugés liés à la couleur de la peau. Une société rongée
mais pas vaincue car le réalisateur tient à nous ouvrir les yeux sur les
évolutions optimistes.
Après avoir salué la performance
des deux acteurs principaux troublants de sincérité, je suis sortie de la salle,
émerveillée comme après un long voyage, pleine de questionnements et surtout avec
une sacrée envie de… manger indien.
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